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Pourquoi les selfies nous rendent grotesques ?

Pourquoi les selfies nous rendent grotesques ?

Pourquoi les selfies nous rendent grotesques ?

Certaines personnes prennent souvent des selfies pour les poster sur les médias sociaux. A tort, ils pensent que ces images sont représentatives de leur apparence réelle. Les conséquences peuvent être déplorables dans le domaine privé autant que dans le domaine professionnel.

Pour les plus sensibles, cette image trompeuse de soi peut avoir un impact sur l’état émotionnel. Dans le domaine professionnel, quand le selfie fait par exemple office de photo de profil Linkedin, l’effet grotesque du portrait a un état dévastateur sur la première impression. C’est pourquoi, des chercheurs se sont penchés sur les effets de distance et les impressions que cela pouvait engendrer.

Éviter les selfies comme la peste pour les photos professionnelles

Certaines personnes, qui ont l’idée était de faire du networking, se prennent parfois en selfie. Ce dernier fait ensuite office de photo de profil sur Linkedin, Xing, Teams, Twitter ou Facebook. Grosse erreur ! Si un selfie était censé améliorer la visibilité ou l’engagement, cela saurait. 

Vous n’avez pas les longs bras d’un Tenaga !

Dans la mythologie japonaise, il existe un Yōkai[1]Le Yōkai 妖怪 est un démon japonais. appelé Tenaga 手長 (Littéralement Longs Bras). Ce démon vivrait sur l’île de Kyūshū. Selon le Wakan Sansai Zue [2]Le Wakan Sansai Zue 和漢三才図会est une encyclopédie illustrée sino-japonaise publiée en 1712 durant l’époque d’Edo, le Tenaga a des bras qui peuvent atteindre une longueur de 9 mètres.

Estampe ukiyo-e du Yôkai Tenaga et Ashinaga

Estampe ukiyo-e de l’époque Edo représentant les yôkais Tenaga et Ashinaga, œuvre d’Utagawa Kuniyoshi, 1855.

Si ce dernier existait réellement, mes amis, et s’il vous chapardez votre smartphone, il pourrait aisément prendre de très beaux selfies… mais pas vous !  Tout simplement parce que vos bras sont trop courts.

Il faut se rendre à l’évidence. Si les hommes ou femmes étaient censés réussir leurs autoportraits avec un smartphone, ils seraient alors nés avec des bras de Tenaga.

Vous vous demandez certainement en quoi la longueur des bras pourrait avoir une incidence sur la qualité de votre selfie. Le Dr Boris Paskhover s’est également posé la même question que vous.

A cause des selfies, les demandes de chirurgies faciales sont en hausse

Depuis l’engouement des selfies, les cabinets de chirurgie faciale sont débordés par des demandes d’opérations nasales.

Selon un sondage de l’Académie américaine 42 % des chirurgiens plasticiens ont signalé que des patients cherchaient à subir des interventions chirurgicales afin de réduire la taille de leur nez. En effet, les patients faisaient cette requette pour améliorer leurs selfies publiés les plateformes de médias sociaux. Un comble !

À cet égard, le Dr Boris Paskhover, a cherché à dissuader ses patients de commettre l’irréparable. A première vue, ces derniers croyaient, à tort, que leur nez était trop gros à cause de leur selfie.

Pendant des années, j’ai entendu des patients et des membres de leur famille me dire : « Oh, regardez mon nez, il a l’air si gros », lorsqu’ils me montraient un selfie », a déclaré le Dr Paskhover. Je savais que les selfies déforment l’apparence de votre nez. Et je voulais le prouver. » – le Dr Boris Paskhover, chirurgien plasticien facial, co-auteur de l’étude Nasal Distortion in Short-Distance Photographs: The Selfie Effect.[3]Brittany Ward, Max Ward, Ohad Fried, and Boris Paskhover, Nasal Distortion in Short-Distance Photographs: The Selfie Effect, JAMA Facial Plast Surg, 2018.

Le selfie déforme de manière grotesque votre nez !

Zoom sur mon nez !

Selon l’étude Nasal Distortion in Short-Distance Photographs: The Selfie Effect publiée dans la revue JAMA Facial Plastic Surgery, 150 centimètres minimum constituent la distance optimale pour prendre des portraits qui ne déforment pas les traits de votre visage.

Il faut noter que les selfies pris à seulement 30 centimètres du visage donnent lieu à une perspective très forte qui fait apparaître votre nez jusqu’à 30 % plus large qu’il ne l’est.

Personnellement, j’ai souhaité faire l’expérience pour mieux en vérifier les résultats. J’ai déjà un gros tarin mais avec le selfie, ce n’est plus un nez… « C’est un roc ! … c’est un pic ! … c’est un cap ! Que dis-je, c’est un cap ? … C’est une péninsule ! »[4]Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, acte I, scène 4, édité par Eugène Fasquelle, Paris, 1898

Exemple de distorsion de la taille du nez sur une photographie à courte distance et un modèle dérivé

 Lorsque le photographie est prise à 30 cm, le visage de l’individu , est déformé de 30%. En outre, le visage  cache les oreilles. Si le visage de la photo prise à 150 cm n’est pas déformé, le risque de flou, avec un smartphone est réel et l’éclairage altéré par la distance. Le selfie enlaidie indéniablement le visage.

Mon nez s’enfle de 30% !

Sur les photos prises avec mon smartphone, les résultats sont édifiants. À 30 cm, mon nez enfle, se gonfle. À cause des effets convexes, le visage s’arrondit bizarrement vers l’extérieur. Par ailleurs, les oreilles rapetissent et sont moins visibles. Diantre !

Par conséquent, avant d’envisager d’investir dans une rhinoplastie esthétique, réfléchissez ! Devriez-vous plutôt faire confiance à un photographe professionnel ou en faire l’économie en faisant un selfie ?

Qui dit champ angulaire étroit, dit gros tarin. 

Si vous prenez un selfie, la longueur focale sera plus étendue. Par conséquent, plus le champ angulaire sera étroit et plus le grossissement sera élevé. C’est une règle élémentaire de l’optique. Pour une photo correcte, la longueur focale doit être plus courte. Ainsi,  l’angle de vue sera plus large et le grossissement réduit.

Les selfies font paraître les gens inquiétants et peu fiables

Déroulement de l’expérience des chercheurs de Caltech 

Nous l’avons vu, le selfie déforme le visage. Quels en sont les conséquences sur les qualités perçues ou les impressions éprouvées ?

Sur ce point, des chercheurs de Caltech ont déterminé que les personnes ayant pris des selfies étaient considérées comme moins fiables, moins attirantes et moins compétentes.[5]Ronnie Bryan,Pietro Perona,Ralph Adolphs, Perspective Distortion from Interpersonal Distance Is an Implicit Visual Cue for Social Judgments of Faces, 2012

Les chercheurs à l’initiative de l’étude Perspective Distortion from Interpersonal Distance Is an Implicit Visual Cue for Social Judgments of Faces, ont d’abord demandé à des participants de juger 36 photographies montrant deux images différentes de 18 personnes. L’une des images a été prise à 60 centimètres du visage et la seconde à une distance d’environ 2,1 mètres.

Les chercheurs ont choisi ces deux distances car l’une se situe à l’intérieur et l’autre à l’extérieur de la distance proche [6]La distance proche, dans l’étude de la proxémie, se situe entre 45 et 75cm. Edward T. Hall, The Hidden Dimension, Page140-160, Garden City, N.Y., Doubleday, 1966.. Afin d’observer l’effet de la distance, les chercheurs ont veillé à ce que les visages de chaque série présentent la même expression et semblent avoir la même taille.

Une trop proche distance signale l’alerte à votre cerveau

Les résultats ont montré que les visages élargies par les distances proches évoquaient pour beaucoup l’agressivité, les comportements contraires à l’éthique et provoquaient la méfiance et l’inquiétude.

Diverses études de proxémie[7]La proxémie est l’étude scientifique des positions relatives des interlocuteurs, des relations spatiales qu’entretiennent les sujets entre eux et des significations non verbalisées … Continue reading ont déjà montré que la distance interpersonnelle, c’est-à-dire le fait que quelqu’un se trouve à l’intérieur ou à l’extérieur de votre espace personnel, peut avoir un impact sur les comportements sociaux. Qui plus est, la distance est liée à l’activité de certaines structures cérébrales.

En dessous de 60 cm, chez les êtres humains, nous entrons dans une zone de sécurité, une zone sensible. Quand la distance entre deux individus est proche, le cerveau sonne l’alarme, déclenchant un comportement de défense. L’inquiétude devient alors palpable. 

Vous avez tous vu les films de Sergio Léone avec ses fameux gros plans sur les pistoleros suants et mal rasés. Vous avez certainement ri en apercevant le gros plan de Christian Clavier et Jean Reno. Si l’effet est comique, c’est parce que la bienveillance des deux héros est mis à mal par le gros plan qui les rend grotesques et effrayants.

Gros plan inquiétant

Gros plan d’un pistoléro sinistre dans le western Il était une fois dans l’Ouest, de Sergio Léone.

gros plan inquiétant

Gros plan comique mais inquiétant des protagonistes médiévaux du film Les Visiteurs, de Jean-Marie Poiré.

Les selfies vous rendent flippants et laids, ne les utilisez pas pour votre networking !

Ces résultats démontrent que le selfie peut influencer une série de jugements sociaux très négatifs. Pire, le selfie peut, à tort, vous donner une mauvaise image de soi.

Les photos rassurantes sont celles qui respectent une distance raisonnable d’un mètre et demi, hors de votre zone de sécurité.

Nous ne saurions trop vous conseiller, pour des portraits d’entreprises ou des photos de profil Linkedin par exemple, d’utiliser de vrais portraits. Ces derniers respecteront votre identité et n’altéreront pas la perception d’un tiers à votre égard.

Références

Références
1 Le Yōkai 妖怪 est un démon japonais.
2 Le Wakan Sansai Zue 和漢三才図会est une encyclopédie illustrée sino-japonaise publiée en 1712 durant l’époque d’Edo
3 Brittany Ward, Max Ward, Ohad Fried, and Boris Paskhover, Nasal Distortion in Short-Distance Photographs: The Selfie Effect, JAMA Facial Plast Surg, 2018.
4 Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, acte I, scène 4, édité par Eugène Fasquelle, Paris, 1898
5 Ronnie Bryan,Pietro Perona,Ralph Adolphs, Perspective Distortion from Interpersonal Distance Is an Implicit Visual Cue for Social Judgments of Faces, 2012
6 La distance proche, dans l’étude de la proxémie, se situe entre 45 et 75cm. Edward T. Hall, The Hidden Dimension, Page140-160, Garden City, N.Y., Doubleday, 1966.
7 La proxémie est l’étude scientifique des positions relatives des interlocuteurs, des relations spatiales qu’entretiennent les sujets entre eux et des significations non verbalisées qu’ils en retirent.  La proxémie a été introduite par l’anthropologue américain Edward T. Hall à partir de 1963.
Pourquoi faut-il sourire sur certaines photographies ?

Pourquoi faut-il sourire sur certaines photographies ?

Pourquoi faut-il sourire sur certaines photographies ?

Du sourire sur les photos pro… Où la science démontre que sourire sur les photographies motive la collaboration, stimule la vente, augmente la productivité et l’influence.

Sourire ou pas sur certaines photographies

Le sourire sur certaines photographies professionnelles  demeure un préalable pour capter l’attention et instaurer la confiance. De nombreuses études ont d’ailleurs montré son influence positive sur la perception. C’est une bonne raison pour ne pas priver vos portraits professionnels ou vos photographies business d’un beau sourire !

Un commercial souriant sur son portfolio aura plus de facilité à établir le contact et convaincre. Les photos d’équipe affichant la bonne humeur valorisent la marque employeur de l’entreprise.

Dès lors que la photo vise à favoriser l’engagement ou la vente, le sourire devient un atout majeur.

Portrait éditorial

© Photo Serge Bouvet – Portrait réalisé pour Rahul MISHRA
La photo de mode est l’exception qui confirme la règle. Malgré son rôle commercial, les mannequins ont obligations de ne pas sourire.

Exception : Dans les sociétés non WEIRD[1]WEIRD est l’acronyme anglais de Western, Educated, Industrialized, Rich, and Democratic qui signifie occidentales, éduquées, industrialisées, riches et démocratiques. L’expression … Continue reading, sourire sur les photographies peut-être mal perçu

En France, par exemple, les personnes qui sourient sont perçues plus favorablement que celles qui ne sourient pas. On encourage donc à raison, pour les portraits d’entreprise ou la photo de profil Linkedin à sourire. On considère ainsi ces sujets comme plus attrayants, plus compétents et plus sympathiques. Le sourire agit comme un facilitateur de la coopération.

Ces qualités du sourire sont supposées être culturellement universelles. Il faut savoir cependant que la plupart des recherches sur le sourire n’ont été menées que dans pays occidentaux industrialisés. En dehors de celles-ci, les études restent lacunaires.

Ainsi, l’étude Be Careful Where You Smile: Culture Shapes Judgments of Intelligence and Honesty of Smiling Individuals [2]Kuba Krys, C. -Melanie Vauclair, Angela Arriola Yu, Be Careful Where You Smile: Culture Shapes Judgments of Intelligence and Honesty of Smiling Individuals, Journal of Non, verbal Behavior volume, … Continue reading, nous met en garde: un individu souriant peut être jugé moins intelligent que le même individu non souriant dans les cultures WEIRD.

Bien sûr, hors de ce cadre WEIRD, les codes varient et le sourire n’a pas les mêmes implications. Mais pour qui cherche à développer son réseau ou collaborer efficacement en France et dans les pays occidentaux, afficher un sourire sur ses photographies reste hautement recommandé au vu de ses bienfaits prouvés sur la perception sociale et la coopération inter-individuelle.

 Le mieux est donc de sourire. 

Portrait d'entreprise

 © Photo Serge Bouvet – Portrait d’entreprise 
Le sourire, c’est du bonus pour booster toute collaboration ou intéraction professionnelle.

Portraits d'entreprise

© Photo Serge Bouvet – Portrait corporate
Ne craignez pas de sourire sur vos portraits corporate ou sur la photo de profil Linkedin. On vous pensera plus sociable, plus sincère et plus compétent. 

Le sourire de vos photographies vous rend attractif, sincère, sociable et compétent.

Depuis la pandémie, les rencontres physiques se sont raréfiées. Par conséquent, la photo est devenue notre principale carte de visite numérique. Pour le dire autrement, la photographie est votre meilleur ambassadeur d’image. Si par exemple, vous souriez sur vos portraits corporate, vous serez plus attractif. Ce n’est pas tout. On percevra chez vous une aura de sincérité, de sociabilité et de compétence assez élevé. Tout cela a été scrupuleusement étudié par des chercheurs.

Preuve en est, aux Etats Unis, on a mesuré, chiffres à l’appui, le rôle du sourire posé dans l’esthétique globale du visage[3]David C. Havens, James A. McNamara, Jr, Lauren M. Sigler, Tiziano Baccetti, The Role of the Posed Smile in Overall Facial Esthetics, the angle orthodontist, 2010. .  Selon l’étude, un sourire a une influence positive sur l’attractivité globale du visage.

Dans une autre étude What is smiling is beautiful and good[4]Harry T. Reis, Ilona Mcdougal Wilson, Carla Monestere, Stuart Bernstein, Kelly Clark, Edward Seidl, Michelle Franco, Ezia Gioioso, Lori Freeman, Kimberly RadoaneWhat is smiling is beautiful and good, … Continue reading, 10 chercheurs ont constaté des résultats similaires, à savoir une augmentation de l’attractivité perçue lorsque le sujet souriait. De plus, les individus souriants se voyaient attribuer des niveaux plus élevés de sincérité, sociabilité et compétence.

Portrait d'entreprise d'une consultante d'entreprise parisienne

© Photo Serge Bouvet – Portrait d’entreprise
Malheureusement, une femme qui ne sourit pas gêne beaucoup plus qu’un homme qui ne sourit pas selon une étude… Discrimination ?

Discrimination : mieux vaut sourire si vous êtes une femme…

Attention aux biais de genre dans la perception du sourire. Si vous êtes une femme, souriez d’autant plus !

Si les femmes ne sourient, elles seront évaluées plus sévèrement que les hommes selon l’étude What is in a Smile?[5]Francine M. Deutsch, Dorothy LeBaron, Maury March Fryer, What is in a Smile?, Psychology of Women Quarterly, 1987..

Même si le sourire reste globalement bénéfique sur les photos, les femmes devront rester vigilantes quant aux biais potentiels qu’il peut renforcer selon les cultures. 

Portrait d'entreprise

© Photo Serge Bouvet – Portrait corporate

Sourire, oui… Mais pas trop.

Sourire, c’est bien, mais pas trop ! L’intensité du sourire influence la perception de soi, selon l’étude Smile Big or Not? Effects of Smile Intensity on Perceptions of Warmth and Competence[6]Ze Wang, Huifang Mao, Yexin Jessica Li, Fan Liu, Smile Big or Not? Effects of Smile Intensity on Perceptions of Warmth and Competence, Journal of Consumer Research, Volume 43, Issue 5, , Pages … Continue reading.  L’intensité du sourire affecte deux dimensions fondamentales des jugements sociaux : la chaleur et la compétence.

Ainsi, les auteurs ont montré que sourire à pleines dents diminue la perception de compétence, deux dimensions clés dans l’évaluation sociale. De même, un sourire bouche fermée limite l’expression de chaleur. En revanche un sourire ttrop visible nuirait à l’influence perçue.

Il s’agit donc de doser subtilement son expression faciale selon les objectifs. Un léger sourire équilibré ferait montre à la fois de sympathie et de maîtrise professionnelle.

Un trop large sourire proche du rire, sur un portrait corporate peut dévaluer votre compétence perçue

© Photo Serge Bouvet – Portrait corporate
Un trop large sourire proche du rire, sur un portrait corporate peut dévaluer votre compétence perçue. La photo de droite est donc plus équilibrée pour faire montre de bonne humeur, de compétence et d’influence perçue.

Portrait photo corporate

© Photo Serge Bouvet – Portrait corporate
Le sourire, c’est la spontanéité de l’émotion sans entrave qui donnent cette impression d’irradiation.

Le potentiel du sourire sur les photographies devrait vous faire sourire.

Portrait d'entreprise

© Photo Serge Bouvet – Portrait corporate
Si le portrait a vocation de déterminer une interaction professionnelle ou plus d’engagement : le mieux est de sourire.

En définitive, le sourire sur les photographies professionnelles exerce un impact indéniable. Plus qu’un simple détail, il donne le « ton » de la relation en instaurant confiance et bienveillance. Il établit un rapport et instaure la confiance. C’est la pierre angulaire de toute relation d’affaires.

Or dans le contexte actuel de transformation numérique, où les contacts distanciés sont monnaie courante. La photo de profil LinkedIn ou photos de profil d’applications de communication collaborative comme Teams ou Zoom représentent le seul lien tangible avec nos interlocuteurs.

C’est donc un élément clé pour amorcer positivement les interactions futures. Un sourire engageant et chaleureux prédisposera favorablement le prospect ou le client à la relation commerciale.

Si votre objectif est d’optimiser votre business, votre image personnelle ou de nouer des partenariats, soigner le sourire de la photographie apparaît comme une nécessité de base. Et il sous-entendra votre engagement à offrir satisfaction dans le domaine du service, de la collaboration ou de la vente.

Si votre objectif est d’améliorer votre business, votre image, vos relations, une bonne photographie apparaît donc comme, plus qu’un impératif,  une nécessité de base. Et cela vaut d’autant plus pour ceux dont la vie professionnelle est liée aux profils de médias sociaux.

Le sourire sur vos photographies, en effet, contribue à former la première impression du prospect, de votre futur collaborateur ou de votre client. C’est finalement le signe positif de l’engagement à offrir un produit, un service satisfaisant ou une bonne collaboration. Cet article sur le sourire devrait donc vous encourager à sourire sur vos photographies professionnelles.

Références

Références
1 WEIRD est l’acronyme anglais de Western, Educated, Industrialized, Rich, and Democratic qui signifie occidentales, éduquées, industrialisées, riches et démocratiques. L’expression tire son origine de l’ouvrage The WEIRDest People in the World: How the West Became Psychologically Peculiar and Particularly Prosperous du chercheur en biologie de l’évolution humaine, le Dr. Joseph Henrich. WEIRD signifie donc en français sociétés occidentales, éduquées, industrialisées, riches et démocratiques
2 Kuba Krys, C. -Melanie Vauclair, Angela Arriola Yu, Be Careful Where You Smile: Culture Shapes Judgments of Intelligence and Honesty of Smiling Individuals, Journal of Non, verbal Behavior volume, 2015
3 David C. Havens, James A. McNamara, Jr, Lauren M. Sigler, Tiziano Baccetti, The Role of the Posed Smile in Overall Facial Esthetics, the angle orthodontist, 2010.
4 Harry T. Reis, Ilona Mcdougal Wilson, Carla Monestere, Stuart Bernstein, Kelly Clark, Edward Seidl, Michelle Franco, Ezia Gioioso, Lori Freeman, Kimberly RadoaneWhat is smiling is beautiful and good, European Journal of Social Psychology, 1990.
5 Francine M. Deutsch, Dorothy LeBaron, Maury March Fryer, What is in a Smile?, Psychology of Women Quarterly, 1987.
6 Ze Wang, Huifang Mao, Yexin Jessica Li, Fan Liu, Smile Big or Not? Effects of Smile Intensity on Perceptions of Warmth and Competence, Journal of Consumer Research, Volume 43, Issue 5, , Pages 787–805, February 2017
Règle des tiers : ce qu’on ne vous dira jamais !

Règle des tiers : ce qu’on ne vous dira jamais !

Règle des tiers : ce qu’on ne vous dira jamais !

Règle des tiers

On a trop surestimé l’efficacité de la règle des tiers en photographie

La règle des tiers en photographie, c’est un peu comme un baptême d’initiation à la composition. A l’heure actuelle, la vision de nombreux photographes est assujettie à cette mystérieuse pratique de la fin du XVIIIème siècle. Cette dernière a été fixée par un peintre et graveur londonien, un certains John Thomas Smith.

Malgré son importance proclamée, la règle des tiers ne joue en fait qu’un rôle mineur dans la photographie et la peinture de haute qualité. Alors la question se pose : les photographes doivent-ils encore faire confiance à la règle des tiers ?

Pour commencer, rappelons ce qu’est la règle des tiers.

Qu’est-ce que la règle des tiers ?

Mentionnons que la règle des tiers est l’une des règles de composition les plus connues, utilisée en peinture et en photographie. C’est le graveur et illustrateur John Thomas Smith qui élabora cette règle au XVIIIème siècle.

Selon lui, le point focal d’une image doit être placé aux tiers horizontaux et verticaux. Selon l’artiste anglais, c’est la voie royale pour obtenir en premier lieu un résultat harmonieux.

JOHN THOMAS SMITH

John Thomas Smith est un peintre, graveur et antiquaire britannique. Il a été conservateur des gravures du British Museum.

La règle des tiers, ce guide mainstream de la photographie numérique

Une règle simple…

A vrai dire, la règle des tiers est un guide de composition mainstream. C’est d’abord facile à comprendre. C’est de surcroît une composition grand public. Enfin, c’est enfin la première composition que tout le monde découvre dans la photographie numérique aujourd’hui.

En 2000, j’avais fait l’acquisition d’un Olympus. Je n’avais jamais fait de photo auparavant. Quand j’ai regardé dans le viseur pour la première fois, j’ai  aperçu 4 lignes rouges formant  la grille des tiers. 

En 2000, j’avais fait l’acquisition d’un Olympus. Je n’avais jamais fait de photo auparavant. Quand j’ai regardé dans le viseur pour la première fois, j’ai  aperçu 4 lignes rouges formant  la grille des tiers. 

… pour tout bon élève, si on veut.

Partant de ce fait, j’ai compulsé quelques ouvrages sur le thème de la composition. J’ai appris que cette grille était fondamentale pour réaliser de belles photographies. Crédule, pendant quelques années, je m’appliquais en bon élève à suivre ce mantra sacré. Et puis un beau jour, je m’en suis lassé.

La règle des tiers n’est pas logique

Quelques années ont passé. En 2020, je  publiais un livre de photographie en noir et blanc, sur l’Inde, intitulé Indiens. Un ami, photographe professionnel de mariage, me fit cette remarque :  » Tes portraits ne suivent pas la règle des tiers. » Cela sonnait comme un reproche.

J’ai tenté de lui expliquer que cette règle ne répondait à aucunes logiques rationnelles mais je manquais d’argument sérieux. Ne croyez-vous pas qu’il serait légitime d’espérer plus de preuves tangibles et historiques à ce sujet ? C’est l’objet de cet article.

La règle des tiers par le mauvais exemple

Parmi les photographies ci-dessus, seule une photographie  respecte la règle des tiers. Ce n’est pas bien grave ! 

Rembrandt et les paysages hollandais à l’origine de la règle des tiers ?

Remarks on rural scenery

Remarks on Rural Scenery est la plus courte publication de l’illustrateur John Thomas Smith. Elle consiste en une suite de vingt eaux-fortes[1]L’eau-forte est un procédé de gravure en taille-douce sur une plaque métallique à l’aide d’un mordant chimique (un acide attaquant le métal). réalisées d’après nature.

L’ouvrage représente des maisons dans des contrées rurales, à la périphérie de la métropole londonienne.

En outre, le livre comprend un essai introductif traitant de Quelques observations et préceptes relatifs au pittoresque.

John Thomas SMITH, Remarks on rural scenery : with twenty etchings of cottages, from nature : and some observations and precepts relative to the pictoresque., Page 16, London : Printed for and sold by Nathaniel Smith and I.T. Smith, 1797

Couverture originale de l’essai sur la peinture de John Thomas SMITH, Remarks on rural scenery : with twenty etchings of cottages, from nature : and some observations and precepts relative to the pictoresque., London : Printed for and sold by Nathaniel Smith and I.T. Smith, 1797

La règle des tiers est évoquée pour la première fois.

Dans ce livre qui se veut un guide pour les peintres, John Thomas Smith évoque pour la première fois la règle des tiers en page 16 :

« Par analogie avec cette « règle des tiers » (si l’on me permet de l’appeler ainsi), j’ai pensé qu’en reliant ou en brisant les différentes lignes d’un tableau, il serait également bon de le faire, en général, selon un schéma de proportion similaire.

 

Par exemple, dans un paysage, déterminer le ciel à environ deux tiers ou encore à environ un tiers, de sorte que les objets matériels puissent occuper les deux autres tiers.

 

Encore, deux tiers d’un élément, (comme l’eau) à un tiers d’un autre élément (comme la terre) et puis les deux ensemble pour ne faire qu’un tiers de l’image, dont les deux autres tiers doivent s’appliquer au ciel et aux perspectives aériennes. »[2]John Thomas SMITH, Remarks on rural scenery : with twenty etchings of cottages, from nature : and some observations and precepts relative to the pictoresque., Page 16, London : Printed for and sold … Continue reading

Une forte appétence pour les paysages hollandais

Le père de John Thomas, Nathaniel Smith, possédait et commerçait une vaste collection de gravures de paysages hollandais.

Tirant profit de ce fond familial artistique, John Thomas Smith va étudier et l’analyser scrupuleusement chacune des œuvres. C’était un prérequis nécessaire pour sauter le pas dans le métier de la gravure.

La collection de gravures, comprenait des œuvres d’artistes contemporains comme Anthonie Waterloo, Jan Both et surtout Rembrandt. Ce sont notamment les gravures détaillées de chaumières qu’aurait peintes le maître Hollandais qui ont suscité l’engouement de John Thomas Smith.

John Thomas Smith décide d’être graveur

Ainsi donc, toutes les illustrations de Nathaniel Smith ont inspiré de manière décisive le projet d’illustration des maisons de campagne de Smith. C’est décidé, il sera graveur !

« Bien que je pusse modeler et sculpter un peu, je désirais ardemment être graveur et je souhaitais vivement être placé sous la direction de Bartolozzi, qui habitait alors Bentinck Street, Berwick Street. Mon père me conduisit chez lui, avec une lettre d’introduction de M. Wilton.[3]John Thomas SMITH, A Book for a Rainy Day, Page 83, Edition Wilfred Whitten,

Un artiste fortement inspiré par ce qu’il pensait être du Rembrandt 

On pourrait dire que Rembrandt a façonné le regard de John Thomas Smith. En outre, le peintre hollandais l’aura éveillé aux joies de la composition. Il y eut hélas méprise ! Il ne faut pas confondre la benne à ordures avec la horde à Ben Hur.

Ah si le pauvre illustrateur Londonien savait, il serait bien frustré ! Les œuvres inspirantes qu’il copiait scrupuleusement, en réalité, n’étaient pas de la main de Rembrandt…

Comment une gravure faussement attribuée à Rembrandt a pu déterminer la règle des tiers ?

La Sainte Famille

"La Sainte Famille" ou "Le Berceau"

1742-1765, Jonathan RICHARDSON, La Sainte Famille ou Le Berceau. Gravure mezzotinte attribué par erreur à Rembrandt, qui a inspiré John Thomas SMITH pour élaborer la règle des tiers. L’auteur de la gravure serait Jonathan Richardson junior selon un bulletin du musée hollandais de Rijksmuseum.

John Thomas Smith était subjugué par la composition d’une gravure mezzotinte[4]La gravure mezzotinte est un procédé de gravure en taille-douce qui permet d’obtenir des valeurs ou niveaux de gris, sans recourir aux hachures ou aux pointillés pour la première fois dans … Continue reading représentant deux femmes qui veillent sur un bébé. L’une lit à la lueur d’une bougie, l’autre tient une mystérieuse corde. C’est une allégorie catholique qui met en scène Sainte-Anne, la Vierge Marie et Jésus.

Sainte Anne trinitaire

Cette représentation de ces protagonistes est un thème iconographique récurent dans l’art catholique que l’on appelle « Sainte Anne trinitaire ».

Quelques tableaux célèbres sont à citer comme celui de Léonard de Vinci, Sainte Anne, la Vierge et l’Enfant Jésus jouant avec un agneau, de Cornelis Engebrechtsz, La Vierge et l’Enfant avec sainte Anne, (1500), d’Albrecht Dürer, La Vierge, l’Enfant Jésus et Sainte Anne (1519), de Francesco Traini, Vierge à l’Enfant avec Sainte Anne, (1340-45),  de Caravage, La Madone des palefreniers (1605-1606), etc.[/ref]

Le berceau

La Sainte Famille de nuit

1642 – 1648, disciple de REMBRANDT, La Sainte Famille de nuit. Peinture à l’huile sur toile, longtemps attribué à Rembrandt. (Rijksmuseum, Amsterdam)

Cette gravure est une reproduction d’une œuvre picturale qui suit la tradition du clair-obscur. Le tableau original intitulé La Sainte Famille de nuit ou le Berceau se trouve aujourd’hui au Musée d’État d’Amsterdam, le Rijksmuseum en néerlandais.

En 2006, un numéro du Bulletin van het Rijksmuseum a été consacré à cette peinture à l’huile sur toile[5]Portret van een man uit de familie Wtenbogaert, Bulletin van het Rijksmuseum Jaarg. 54, Nr. 2 (2006), Lire en ligne « Vragen bij het « Portret van een man uit de familie Wtenbogaert« .

Jonathan Richardson Junior

On a longtemps cru, que le Berceau était l’œuvre de Rembrandt. C’est, en fait, un disciple du peintre hollandais qui l’aurait réalisé entre 1642 et 1648.

Le Bulletin inclut, à la page 102, une référence à la gravure mezzotinte réalisée entre 1742 et 1765, soit un siècle après l’œuvre originale, par un certain Jonathan Richardson Junior.

Pauvre John Thomas Smith qui vouait un culte à Rembrandt !

De la lumière et de l’ombre

Dans le chapitre « De la lumière et de l’ombre », il remarque que la gravure de Jonathan Richardson Junior, qu’il pense être celle  de Rembrandt intitulée Le berceau, semble respecter une logique de construction singulière :

« En contemplant les tableaux des meilleurs maîtres, en particulier ceux de Rembrandt, j’ai observé que la lumière principale est le plus souvent placée près du milieu de la scène et que plus des deux tiers du tableau sont dans l’ombre. Le beau tableau intitulé Le berceau, (ndlr : The Cradle dans le livre) qui se trouve maintenant dans la collection de M. Knight, confirme cette remarque.[6]John Thomas SMITH, Remarks on rural scenery : with twenty etchings of cottages, from nature : and some observations and precepts relative to the pictoresque, Page 15, London : Printed for and sold by … Continue reading

Chose étonnante, la règle des tiers s’appliquait donc surtout à la gestion des ombres et de la lumières.

Deux lumières distinctes et égales ne devraient jamais apparaître dans le même tableau. L’une doit être principale et les autres subordonnées, tant en dimension qu’en degré.

Les parties inégales et les gradations conduisent facilement l’attention d’une partie à l’autre, tandis que les parties d’apparence égale la tiennent maladroitement suspendue comme si elle était incapable de déterminer laquelle de ces parties doit être considérée comme subordonnée. » (Ibid.)

Un comble : aucune illustration de John Thomas Smith ne suit la règle des tiers

Si l’on excepte les illustrations antérieures à la date d’écriture de Remarks on rural scenery, en observant son œuvre, gravures et quelques rares peintures, on pourrait s’attendre en toute logique à ne voir que des compositions respectant scrupuleusement la règle des tiers. Qu’en est-il dans les faits ? 

Règle des tiers absente de la campagne anglaise

Compulsez son ouvrage fondateur de la règle des tiers, Remarks on rural scenery qui illustre la campagne anglaise. Contre toute attente, vous ne parviendrez pas à dénicher une seule illustration qui suit scrupuleusement la règle que l’auteur a édictée. 

Règle des tiers non respectée

Feuilletez son livre qui dresse le portrait de  vagabonds  Vagabondianan[7]John Thomas SMITH, Vagabondiana Or, Anecdotes of Mendicant Wanderers Through the Streets of London, with Portraits of the Most Remarkable Drawn from the Life, Toutes les illustrations issues de … Continue reading. Là aussi, John Thomas SMITH fait fi de ses recommandations sur la règle des tiers.

Antiquities of Westminster

Jetez un coup d’œil de chineur à son livre sur les antiquités de Westminster [8]John Thomas SMITH, Antiquities of Westminster : containing two hundred and forty-six engravings, Londres, Printed by T. Bensley, Bolt Court, for J.T. Smith, 1807. Lire l’ouvrage en ligne. Cherchez toujours, les compositions des illustrations n’ont rien à voir avec la règle des tiers

Lives of Famous London Beggars

Parcourez ces portraits de mendiants de Londres Lives of Famous London Beggars, With Forty Portraits of the Most Remarkable[9]John Thomas SMITH, Lives of Famous London Beggars, With Forty Portraits of the Most Remarkable, Londres, Diprose and Bateman, . Les compositions s’émancipent allègrement de ses principes.

Ancient Topography of London

Observez ces gravures de rues dans l’ouvrage Ancient Topography of London[10]John Thomas SMITH,Ancient Topography of LondonContaining Not Only Views of Buildings… But Some Account of Places and Customs Either Unknown, Or Overlooked by the London Historians, Londres, J. … Continue reading. Règle des tiers toujours absente !

Lady Plomer’s Palace

1797, John Thomas SMITH, Lady Plomer’s Palace. Gravure figurant dans l’ouvrage « Remarks on rural scenery ». La maison est au centre de l’illustration. La vieille femme se trouve dans une zone inférieure aux deux tiers.

1812, John Thomas SMITH, Hôpital Bethelem

1812, John Thomas SMITH, Hôpital Bethlem. Le sujet courbé à droite de l’image n’a pas été dessiné au deux tiers du cadre

New elegy par John Thomas Smith

© 1817, John Thomas SMITH, New Elegy, gravure tirée de Vagabondiana: Or, Anecdotes of Mendicant Wanderers Through the Streets of London, with Portraits of the Most Remarkable Drawn from the Life. L’inventeur de la règle des tiers ne la suit jamais dans ces illustrations.

Pourquoi la règle des tiers n’influe pas sur la qualité des photographies ? 

Postulat de la règle des tiers

La règle des tiers postule que l’œil humain gravite naturellement vers les quatre points d’intersection des lignes de force et que ces points sont l’endroit idéal pour placer des objets dans la composition.

Incidence esthétique : nulle

Ce paradigme sacré a volé en éclat en 2014 quand une équipe de quatre chercheurs a décidé d’y voir plus clair. Dans une étude intitulée Evaluating the rule of thirds in photographs and paintings [11]Seyed Ali Amirshahi, Gregor UWE HAYN-LEICHSENRING, Joachim DENZLER, Christoph REDIES, Art & Perception, Evaluating the rule of thirds in photographs and paintings, Volume 2 : Issue 1-2,, 01 Jan … Continue reading, ils ont constaté que la règle des tiers avait une incidence nulle sur l’attrait esthétique d’une image.

Saillance visuelle

200 photographies et près de 727 peintures réalisées par des artistes de renom et collectionnées par des musées prestigieux, ont été examinées au peigne fin par l’ordinateur et un panel de personnes. Le recours à l’informatique s’est justifié pour faciliter l’analyse automatique de la saillance visuelle.

 Cartes de saillance

© Seyed Ali AMIRSHAHI, Gregor UWE HAYN-LEICHSENRING, Joachim DENZLER, Christoph REDIES, Evaluating the Rule of Thirds in Photographs and Paintings. Carte de saillance visuelle pour visualiser les points d’attention (zone rouge)  sur un ensemble d’images respectant la règle des tiers. Etonnement, l’œil humain ne se focalise pas sur les deux tiers de l’image.

Qu’est-ce que la saillance visuelle?

Dans le domaine de l’informatique, des progrès ont été réalisés pour décrire le mécanisme de l’attention humaine.

Lors d’une analyse d’image, les données recueillies permettent de modéliser par des zones de couleurs plus ou moins contrastées, de mieux distinguer qualitativement ce qui est plus ou moins bien perçu par l’œil humain.

La saillance visuelle permet donc de mieux percevoir ce qui saute aux yeux et de mieux hiérarchiser les points d’intérêt visuels dans une image.[12]L. Itti, C. KOCH et E. NIEBUR, A model of saliency-based visual attention for rapid scene analysis, IEEE Transactions on Pattern Analysis and Machine Intelligence, vol. 20, numero 11, page 1254 à … Continue reading

La règle des tiers est moins qualitative que normative

Le résultat de l’étude Evaluating the rule of thirds in photographs and paintings est cinglant. Il faut souligner que la règle des tiers n’influe aucunement sur la qualité des images.

A l’instar du nombre d’or, la règle des tiers, en fin de compte, se distingue plus par son « aspect normatif de la création d’œuvres d’art plutôt que par son aspect qualitatif ».

Pour cette raison, les auteurs de l’étude encouragent à abandonner cette règle normative qu’ils n’ont pas retrouvée dans les photographies et les œuvres d’art de haute qualité.

La règle des tiers n’est pas suivi par les grands noms du 8ème art

 Jugez-en par vous-même. Prenons le cas des photographies de grands photographes comme Vineet Vohra[13]Vineet VOHRA, Serendipity, Eyeshot, 200 pages, 2020, d’Olivier Föllmi[14]Olivier FÖLLMI, Hommage à l’Inde, La Martinière, 2005., de Mao Ishikawa [15]Mao ISHIKAWA,Hot Days in Okinawa, Foil, 2013., Liu Zheng, [16]Liu ZHENG, The Chinese, Steidl, 2004, etc. La règle des deux tiers n’est pas la norme chez eux et c’est tant mieux ! 

Règles des tiers

2016, Serge BOUVET, L’hygiène nasale ayurvédique (Jodhpur, Inde). Certaines de mes photos ont respectées la règle des tiers mais n’allez pas croire que cette composition normative a une incidence sur l’esthétique de la photographie.

La règle des tiers : une contrainte artistique de plus ! 

Une convention nécessaire ?

En prenant en considération tout ce que nous savons sur la règle des tiers, on serait tenté de jeter le bébé avec l’eau du bain.

Comme je l’ai évoqué dans l’article Pourquoi la contrainte est le cadre idéale de la photographie ?, la photographie a besoin de contrainte artistique pour s’accomplir pleinement parce que les règles conventionnelles ne sont pas un obstacle à la rupture artistique.

Une règle pour expérimenter

Si la règle des tiers peut sembler d’une banalité confondante, tout compte fait, elle permettra aux photographes aventuriers d’ouvrir a posteriori un espace d’expérimentation riche.

Apprendre puis s’émanciper

Au début, n’importe quel novice fait ses classes avec la règle des tiers dès l’achat d’un smartphone ou d’un hybride où figure la  grille du graveur John Thomas Smith.

Se donner comme rituel de ne photographier qu’au deux tiers est, selon moi, un bon départ pour mieux remettre en question cette règle traditionnelle de photographie, s’en émanciper et enfin proposer une vision déviante qui n’appartiendra qu’à vous.  

Références

Références
1 L’eau-forte est un procédé de gravure en taille-douce sur une plaque métallique à l’aide d’un mordant chimique (un acide attaquant le métal).
2 John Thomas SMITH, Remarks on rural scenery : with twenty etchings of cottages, from nature : and some observations and precepts relative to the pictoresque., Page 16, London : Printed for and sold by Nathaniel Smith and I.T. Smith, 1797
3 John Thomas SMITH, A Book for a Rainy Day, Page 83, Edition Wilfred Whitten,
4 La gravure mezzotinte est un procédé de gravure en taille-douce qui permet d’obtenir des valeurs ou niveaux de gris, sans recourir aux hachures ou aux pointillés pour la première fois dans l’histoire de la gravure. Cette technique autorise une grande variété de teintes, d’où le nom de « mezzotinte » ou « mezzoteinte »
5 Portret van een man uit de familie Wtenbogaert, Bulletin van het Rijksmuseum Jaarg. 54, Nr. 2 (2006), Lire en ligne « Vragen bij het « Portret van een man uit de familie Wtenbogaert« 
6 John Thomas SMITH, Remarks on rural scenery : with twenty etchings of cottages, from nature : and some observations and precepts relative to the pictoresque, Page 15, London : Printed for and sold by Nathaniel Smith and I.T. Smith, 1797. Lire le chapitre en ligne : Of Light and Shade
7 John Thomas SMITH, Vagabondiana Or, Anecdotes of Mendicant Wanderers Through the Streets of London, with Portraits of the Most Remarkable Drawn from the Life, Toutes les illustrations issues de l’édition de 1874 sont accessible en ligne.
8 John Thomas SMITH, Antiquities of Westminster : containing two hundred and forty-six engravings, Londres, Printed by T. Bensley, Bolt Court, for J.T. Smith, 1807. Lire l’ouvrage en ligne
9 John Thomas SMITH, Lives of Famous London Beggars, With Forty Portraits of the Most Remarkable, Londres, Diprose and Bateman, 
10 John Thomas SMITH,Ancient Topography of London
Containing Not Only Views of Buildings… But Some Account of Places and Customs Either Unknown, Or Overlooked by the London Historians
, Londres, J. M’Creery, published and sold by the proprietor, John Thomas Smith, etc., 1815. Lire en ligne l’ouvrage.
11 Seyed Ali Amirshahi, Gregor UWE HAYN-LEICHSENRING, Joachim DENZLER, Christoph REDIES, Art & Perception, Evaluating the rule of thirds in photographs and paintings, Volume 2 : Issue 1-2,, 01 Jan 2014
12 L. Itti, C. KOCH et E. NIEBUR, A model of saliency-based visual attention for rapid scene analysis, IEEE Transactions on Pattern Analysis and Machine Intelligence, vol. 20, numero 11, page 1254 à 1259,novembre 1998,
13 Vineet VOHRA, Serendipity, Eyeshot, 200 pages, 2020
14 Olivier FÖLLMI, Hommage à l’Inde, La Martinière, 2005.
15 Mao ISHIKAWA,Hot Days in Okinawa, Foil, 2013.
16 Liu ZHENG, The Chinese, Steidl, 2004
Portrait photo de Mauricio Clavero KOZLOWSKI

Portrait photo de Mauricio Clavero KOZLOWSKI

Portrait éditorial de Mauricio Clavero Kozlowski
© 2021, Serge Bouvet

Portrait photo de Mauricio Clavero KOZLOWSKI

Mauricio Clavero Kozlowski ou la touche stylée et dorée qui fait la différence

Si Paris héberge de nombreuses maisons de joaillerie bien installée, la capitale de la mode et du luxe voit également naître une nouvelle vague de créateur unique comme Mauricio Clavero Kozlowski.

Ce n’est pas la première fois que j’ai privilège de faire des portraits éditoriaux pour Mauricio. Nous avons, en effet, eu l’occasion de travailler ensemble sur ses projets artistiques lorsqu’il officiait comme directeur artistique chez Daum, Haviland puis Odiot.

En 2019, il se lançait finalement dans une nouvelle aventure créative dans le domaine de la joaillerie, donnant vie à une superbe collection avant-gardiste de bijoux de sa marque éponyme Sorux Paris.

Pourquoi les portraits photos devaient être un écho à la quête de pureté et du détail ?

Portrait éditorial de Mauricio Clavero Kozlowski, président de SORUX STUDIO, président de Sorux Paris
Portrait éditorial de Mauricio Clavero Kozlowski
© 2021, Serge Bouvet

Le créateur franco-chilien a fait le choix de créer des bijoux qui valorise les individus en s’exemptant des genres. Ses collections de colliers, de bague ou de boucles d’oreilles peuvent donc autant être portées par tous.

Outre cela, ses bijoux ont été conçus en ayant en point de mire la « pureté » et le « détail ». Par conséquent, il fallait donc que je respecte ses thèmes pour représenter le créateur et l’ambassadeur de la marque.

Portraits éditoriaux dans un studio de création de Montparnasse

Paris, 23 juillet 2021, 13h00. Le rendez-vous pour le shooting fut pris dans un studio de création du quartier de Montparnasse.

Le bâtiment offrait plusieurs avantages : lumières et blancheur lactescente. Deux sources d’éclairage et un réflecteur face argentée ont été nécessaires pour la première photographie. Pour le second portrait, la lumière naturelle et le réflecteur auront suffi.

La séance de photo aura duré 30 minutes. Les portraits éditoriaux appuieront bientôt sa campagne marketing : communication de presse, illustration d’article presse papier et online.

Si le premier portrait éditorial respectait le cahier des charges, le second s’en écartait allègrement. Il y avait une fresque circulaire qui avait attiré mon attention. C’est après avoir rangé tout le matériel que je lui proposais de faire un dernier portrait photo.

Comment le cadre stimule notre contemplation ?

Comment le cadre stimule notre contemplation ?

Comment le cadre stimule notre contemplation ?

Au commencement était la contemplation

Quand l’augure interprétait le ciel

Peut-on parler de photographie sans évoquer la contemplation ? Cette dernière est en effet pourvoyeuse de plaisir créatif et du jeu de l’interprétation. Le cadre rend tout cela possible.

Durant l’Antiquité romaine, le devin romain, l’augure, donnait une signification à ce qu’il observait. Ainsi, l’auspice priait Jupiter de lui montrer tous les indices avant-coureurs d’un bon présage. Le magistrat romain comptait sur ces prédictions pour, par exemple, légiférer ou ajourner une sentence.

« Les augures étaient les interprètes de Jupiter en sa qualité de dieu maître des « signes », c’est-à-dire de toutes les manifestations sensibles qui permettent à l’homme de percevoir les approbations, les mises en garde ou les refus de la volonté céleste.

Ce travail d’interprétation n’était que de consultation, jamais de prévision ; il ne se fondait que sur des signes définis à l’avance par l’augure ; il consistait à demander si l’accès de telle personne à une fonction politique ou religieuse, si le choix d’un emplacement pour un édifice était mystiquement fondé. » – CICÉRON, De legibus, 52 av. J.C

L’avenir préoccupait l’esprit de la plupart des Romains. Par conséquent, ils considéraient les présages de leurs augures avec une certaine gravité. La mission de ces « interprètes de Jupiter» reposait sur leur contemplation.

Le regard contemplatif

Le cadre motive notre quête de sens. Pour cela, le regard contemplatif est la clé pour interpréter les signes. Ces derniers gouvernent, à juste titre, les décisions de celui qui regarde : le photographe, l’artiste peintre, le cadreur de cinéma ou le dessinateur de bande dessinée en sont les principaux ambassadeurs.

Cadre : Crosse de lituus

Crosse de Lituus
© 2020, Serge BOUVET

Pourquoi le cadre est un espace de signification ?

Lituus et templum

La lecture des présages du devin, que l’on nommait l’augure, se déroulait en trois temps. Premièrement, il scrutait d’abord le ciel.

Deuxièmement,  avec son Lituus[1]Bâton à extrémité recourbée que portaient les augures., un bâton dont la crosse dessinait une façon de spirale, il dessinait un cadre pour délimiter un champ visuel : le templum[2]Le templum désigne aussi la pratique religieuse et divinatoire des étrusques et romains. Palmira Cipriano, Templum, Rome, Università « La Sapienza », 1983.. Par ce geste, il distinguait le sacré et du profane. Ce cadre constituait le champ visuel dans lequel il observait le vol des oiseaux.

Troisièmement, l’augure, rompu aux secrets du ciel et des dieux, annonçait la prédiction. Il opérait des associations et par le jeu des analogies ésotériques, en tissait des liens entre le visible (le ciel et les oiseaux qu’il observait) et l’invisible qu’il imaginait.[3]Pour plus de détails sur le protocole ésotérique de l’augure, lire : André MAGDELAIN, L’auguraculum de l’arx à Rome et dans d’autres villes, pp. 193-207, Publications de … Continue reading.

La pratique du templum, une contemplation dans le cadre

Un cadre sacré

Le cadre du templum divinatoire était un espace imaginaire sacré, créant une distance entre la réalité et ce que pouvais entrevoir l’augure romain. Le cadre tracé par le lituus délimitait son champ d’investigation interprétative.

Le cadre, un objet de signification

Ce rituel du cadrage pour contempler puis interpréter les signes présents dans le champ d’observation est l’acte fondateur du templum. C’est d’ailleurs de ce protocole romain, la pratique du templum,  que le mot contemplation puise son origine étymologique. 

Que nous apprend l’éthymologie du templum ?

Templum tire son origine du grec temenos τέμενος, qui signifie « domaine séparé, espace réservé au culte et coupé du monde profane ».[4]René GINOUVÈS, Dictionnaire méthodique de l’architecture grecque et romaine, t. III : Espaces architecturaux, bâtiments et ensembles, Rome, École française de Rome, coll. « Collection de … Continue reading

Templum signifie découper. Diviser est le geste fondamental de celui qui pratique le templum. Il découpe une surface carrée, ronde, rectangulaire par exemple, un champ visuel dans la continuité infinie de ce qu’il observe. Ce faisant, cet espace est investi d’une signification, d’une information.

Le cadre, un objet de simplification

Le templum comme le cadre, nous renvoie donc à la division de l’espace que nous embrassons du regard. Cette fragmentation n’a pas d’autres but que de nous simplifier la tâche. En focalisant son objectif sur un point de l’espace, nous saisissons une information simple et intelligible.

Grâce à l’interprétation ambiguë, comment le cadre donne du sens ?

Un cadre pour les profanes et les initiés

Toutes les croyances religieuses présentent un même caractère commun : une distinction entre ce qui est sacré ou profane. Cela implique que certaines pratiques religieuses soient ouvertes aux initiés mais fermées aux profanes.

Tandis que l’augure épie à travers son templum des hirondelles dans le ciel et qu’il en décode une vision du futur, le profane ne voit, lui, que des volatiles et c’est tout.

L’intention double du cadre

Annonciation de Francesco del Cossa, une allégorie dans le cadre

Lorsque Francesco Del Cossa peint un escargot sur le bord du cadre, l’initié versé aux symboles chrétiens distinguera un discours sur la résurrection[5] Daniel ARASSE, L’Homme en perspective – Les primitifs d’Italie, Sous le regard de l’escargot, Paris, Hazan, 2008, 336 p, le profane ne voit, lui, qu’un escargot ou peut-être, s’il est gourmand une recette au beurre et aux fines herbes et c’est tout.

Quelle était l’intention de l’artiste italien en peignant dans ses cadres un ange, une vierge et un escargot ? Le propos de Francesco Del Cossa était double : montrer en disant « ceci n’est que ceci » et  proposer un mystère à élucider « ceci n’est que ceci mais il y a un autre message à comprendre si vous êtes initiés. »

L’ambivalence du cadre

L’augure romain qui scrute à travers son templum le dessin du vol d’hirondelles ne voit pas des hirondelles mais autre chose. En traçant son templum, il postule la présence, au-delà de ce qu’il perçoit au premier regard, d’un mystère à élucider. Le templum, à l’instar du cadre, devient ainsi équivoque puisqu’il propose d’entrevoir quelque chose qui revêt plusieurs significations.

Un cadre pour voir et comprendre

Le cadre d’une image n’invite-il pas aussi le spectateur à adopter deux approches : voir et comprendre en postulant l’existence de quelque chose de caché ? À l’examen d’une photographie, se pose souvent toujours la question : « Mais qu’à voulu dire l’artiste ? ».

Le cadre offre à comprendre comme à s’interroger. Se faisant, il propose d’abord de s’adonner à la contemplation. Il invite dans ensuite à voir au-delà de ce qui est visible pour tenter de percer le mystère de l’image. Il s’agit en fait pour le spectateur de lui trouver un sens.

Contempler, interpréter, donner du sens

Le public face à une œuvre, que cela soit une photo, une peinture ou une image numérique, procède un peu comme cet augure antique : il contemple d’abord, puis il interprète et enfin il donne du sens.

« Toute mise en énigme présuppose que l’œuvre vaut la peine d’y chercher quelque chose, parce qu’elle est porteuse d’autre chose que sa matérialité (ou son immatérialité) même. » – Nathalie HEINIC[6]Nathalie HEINIC, Les parcours de l’interprétation de l’œuvre, Ce que fait l’interprétation, Trois fonctions de l’activité interprétative, L’Harmattan, 2008. Sur … Continue reading 

De la contemplation à l’interprétation

Les trois dévots du petit temple de Jodhpur

© 2018, Serge BOUVET, Les trois dévots du petit temple de Jodhpur

Saint Jérôme dans son étude (Antonello de Messine)

L’interprétation s’amorce par l’inventaire des choses visibles

Jodhpur

Jodhpur est une ville de l’Inde fantastique. Tout peut être prétexte à une photo comme ce petit temple dédié à la divinité Hanuman. Je me suis arrêté une heure pour contempler cet édifice. J’observais les allées et venues des dévots, pour saisir le bon moment.

Accroche visuelle

Au gré de mes contemplations, lorsque je découvre une situation, mon œil cherche une accroche visuelle. C’est d’abord l’entrée de forme ogivale du temple qui a attiré mon regard.

Souvenir de surcadrage

Je pioche quelques références de la Renaissance dans mes souvenirs : une peinture à l’huile d’Antonello de Messine, Saint Jérôme dans son étude  à cause de son inclination pour le surcadrage. Je me dis qu’il serait dommage de ne pas aussi  utiliser un élément de la scène, comme l’ouverture ogival, pour introduire un cadre dans le cadre.

Surcadrage
Parcours du regard dans une composition bien encadrée

Souvenir de surcadrage

Je procède ensuite à un inventaire  rapide : mon œil cible la vieille femme assise sur les marches du petit temple bleu, puis il avise la femme au sari rouge avec son petit panier, le relief du petit éléphant, puis celui du lion de gauche, l’homme dans la pénombre, le second lion de gauche, le relief du grand éléphant puis enfin retour sur la femme pensive.

Contemplation et interprétation

Tous interprètes !

Nous sommes tous comme ces devins romains qui, contemplant le ciel à travers leur templum, proposaient une interprétation.

Le photographe qui contemple une scène, en prenant une photographie, l’interprète en fonction de ses connaissances  et de son attachement à un courant culturel. Le public qui, à son tour découvre la photographie d’un auteur, procède aussi comme l’augure : il contemple l’image, l’interprète et lui donne une certaine valeur. 

La photographie, ouverte à l’interprétation

Lorsque l’augure romain dessinait son templum, il n’avait pas vocation à être ouvert à tous. Son « art » n’était accessible qu’à un cercle restreint d’initiés partageant les mêmes croyances.

S’agissant de la photographie, il existe bien aussi des codes esthétiques, des courants traditionnels de l’image, des cercles élitistes certes, mais rien de tout cela n’empêchera de produire de l’interprétation à quiconque.

Contempler et interpréter sont si humain !

cadrage photo

« Toute œuvre d’art est « ouverte » en ce qu’elle peut être interprétée de différentes façons, sans que son irréductible singularité n’en soit altérée » – Umberto ECO[7]Umberto ECO, L’œuvre ouverte, édition Seuil, 1962

La photographie délivre toujours un message ambigu, une pluralité de significations qui coexistent dans le cadre. Rendu public, ce message devient le templum du public. Nous avons chacun une culture qui oriente notre jouissance contemplative.

Une photographie aura de la valeur si elle détermine des interprétations multiples.  Sa valeur, c’est que le photographe ou le public puisse l’apprécier manière créatrice. Chaque photographie exige d’abord de son interprète une réponse personnelle. Ce qui fera la force de art, c’est cette interaction entre ce qui est contenu dans le cadre de sa photographie et la subjectivité de celui qui la reçoit.

Ce qu’il faut retenir du cadre

Que l’on parle de photographie, d’art pictural, de bande dessinée ou de cinéma, nous avons vu que la vocation du cadre est d’abord de favoriser notre sensibilité grâce à la contemplation.

Le premier contact avec ce que nous propose de voir le cadre est dans un premier lieu purement  visuel.

The Sheepshanks Gallery, South Kensington Museum (1876). Courtesy of the Victoria and Albert Museum.

© 1876 – The Sheepshanks Gallery, South Kensington Museum,
Courtesy of the Victoria and Albert Museum.

En faisant le parallèle avec l’augure romain, nous avons pu souligner que le cadre est aussi un outil qui donne une valeur singulière à une interprétation et qu’il ouvre tout un champ de significations déterminés par nos croyances et notre culture.

Celui qui contemple une situation particulière, une photographie, une peinture ou même la case d’une bande dessinée participe à la signification de l’œuvre.

Au même titre que l’augure romain, celui qui regarde perçoit le sens d’une photographie à travers son vécu, ses désirs et ses connaissances. Pour le dire autrement, ce qu’il y a à l’intérieur du cadre d’une photographie produit du sens grâce aux rapports que celui qui contemple peut établir avec son univers personnel.

Tout cela concourt à stimuler la contemplation, à tout simplement donner du plaisir à regarder ou, pour ce qui me concerne, à photographier.

Références

Références
1 Bâton à extrémité recourbée que portaient les augures.
2 Le templum désigne aussi la pratique religieuse et divinatoire des étrusques et romains. Palmira Cipriano, Templum, Rome, Università « La Sapienza », 1983.
3 Pour plus de détails sur le protocole ésotérique de l’augure, lire : André MAGDELAIN, L’auguraculum de l’arx à Rome et dans d’autres villes, pp. 193-207, Publications de l’École Française de Rome, 1990.
4 René GINOUVÈS, Dictionnaire méthodique de l’architecture grecque et romaine, t. III : Espaces architecturaux, bâtiments et ensembles, Rome, École française de Rome, coll. « Collection de l’École française de Rome » (no 84), 1998, 492 p. Lire en ligne
5 Daniel ARASSE, L’Homme en perspective – Les primitifs d’Italie, Sous le regard de l’escargot, Paris, Hazan, 2008, 336 p
6 Nathalie HEINIC, Les parcours de l’interprétation de l’œuvre, Ce que fait l’interprétation, Trois fonctions de l’activité interprétative, L’Harmattan, 2008. Sur l’interprétation, lire : https://www.cairn.info/revue-sociologie-de-l-art-2008-3-page-11.htm
7 Umberto ECO, L’œuvre ouverte, édition Seuil, 1962